CEDH, 3 sept. 2015, Berland c/ France, req. n° 42875/10: Inapplicabilité de l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme aux mesures de sûreté de l’article 706-136 du Code de procédure pénale.

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Maitre de conférences

« La déclaration d’irresponsabilité pénale et les mesures de sureté qui l’accompagnent ne constituent pas une « peine » au sens de l’article 7, § 1, de la Convention, et doivent être analysées comme des mesures préventives auxquelles le principe de non-rétroactivité énoncé dans cette disposition n’a pas vocation à s’appliquer ».

En l’espèce, en septembre 2007, un individu, M. B., avait été mis en examen pour des faits d’assassinat et de violences volontaires. Après plusieurs expertises psychiatriques, la chambre de l’instruction avait conclu à l’irresponsabilité pénale de l’individu et avait, conformément aux dispositions nouvelles résultant de la loi n° 2008-174 du 25 février 2008, prononcé une hospitalisation d’office et deux des mesures de sûreté prévues à l’article 706-136 du code de procédure pénale : l’interdiction, pendant une durée de vingt ans, de détenir une arme et l’interdiction d’entrer en relation avec les parties civiles. Après le rejet de son pourvoi en cassation, le 14 avril 2010, M. B. avait saisi la Cour européenne des droits de l’homme sur le fondement de l’article 7 de la Convention. Selon lui, la déclaration d’irresponsabilité pénale avoisinerait une déclaration de culpabilité et les mesures qui en découlent (hospitalisation d’office et interdictions de l’article 706-136) constitueraient des peines dont l’application rétroactive serait contraire à l’article 7 de la Convention. Ces arguments n’ont pas convaincu les juges de Strasbourg qui ont conclu que les mesures de l’article 706-136 du Code de procédure pénale ne constituent pas des peines mais des « mesures préventives ».
Pour justifier sa décision, la Cour rappelle sa conception autonome de la notion de « peine » et passe l’hospitalisation d’office et les mesures de l’article 706-136 du Code de procédure pénale sous le spectre des critères classiques dégagés dans l’arrêt Welch c/ Royaume-Uni du 9 février 1995. Ces critères permettent ainsi à la Cour d’aller au-delà des apparences afin de déterminer elle-même si une mesure particulière s’analyse au fond en une « peine » au sens de l’article 7 de la Convention. Parmi ces critères, une distinction s’établit naturellement entre un critère subsidiaire et indicatif, qui est celui de la qualification formelle retenue par l’État membre attaqué et des critères déterminants. S’agissant de ces derniers, dans l’arrêt Berland, la Cour va notamment apprécier si les mesures litigieuses ont été imposées à la suite d’une condamnation pour une infraction. La Cour observe alors qu’elles ont été prononcées par la chambre de l’instruction, dans le cadre de la procédure de déclaration d’irresponsabilité pénale pour cause de trouble mental qui « ne constitue nullement une condamnation mais la constatation d’un état susceptible d’avoir des conséquences juridiques ». La Cour examine ensuite succinctement la nature et le but des mesures qui lui sont soumises, pour conclure que ces dernières possèdent un but uniquement préventif ou dissuasif et exclure, par conséquent, la qualification de « peine ».
Bien qu’un doute soit toujours permis s’agissant de la véritable nature de ces mesures qui, malgré leur qualification formelle, font fortement penser à des peines, la Cour européenne confirme la position des juges français qui, en dépit de quelques hésitations, considèrent unanimement que les mesures de l’article 706-136 du Code de procédure pénale sont bien des mesures de sûreté (Cons. constit., 21 février 2008 ; Crim. 16 décembre 2009, n° 09-85.153).

Lire l’arrêt…

Pour aller plus loin:

Dr. Pén. 2015, comm. 134, V. Peltier ; AJ Pénal 2015, p. 599, obs. C. Margaine.

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